Grand Débat national : reconnaître la place particulière de la commune

L'AMF05 a remis les cahiers de doléances recueillis dans les communes à la préfète des Hautes-Alpes.

Dans le cadre du Grand débat national, les maires des Hautes-Alpes se sont réunis le 14 janvier à Chorges afin d’échanger sur le rôle et la position de l’AMF05 dans notre département. Il a été acté que chaque maire était libre de de se positionner comme facilitateur ou organisateur de ce débat en fonction de la réalité et des enjeux locaux. 

Les maires ont également formulé des contributions au débat, concernent  plus particulièrement les relations entre l’Etat et les collectivités territoriales. Ces contributions ont été remises le 24 janvier à la préfète des Hautes-Alpes.

«Si les maires sont disponibles et peuvent faciliter le dialogue, c’est parce qu’ils sont présents quotidiennement auprès des Français, qu’ils connaissent leurs difficultés et leurs attentes et qu’ils gardent leur confiance», rappelle le texte de ces contributions.

Sur le fond, les maires des Hautes-Alpes relèvent que «les collectivités locales ne portent pas la responsabilité des déficits de l’État. Elles ont toutes des budgets en équilibre et financent près de 70% des investissements publics du pays. Les dotations de l’État sont la légitime contrepartie d’impôts locaux supprimés ou de transferts de charges, opérés par la loi, et qu’elles sont donc un dû et non une faveur.»

S’agissant de la suppression de la taxe d’habitation – sans révision des valeurs locatives – elle remet gravement en cause l’autonomie fiscale des communes, fige et amplifie les inégalités entre populations et territoires. Elle ne permettra plus de maintenir au même niveau les services apportés à la population.

La loi NOTRe doit être corrigée en ce qui concerne son volet intercommunal et les dispositions relatives à l’eau et l’assainissement. Les moyens dévolus aux agences de l’eau doivent être maintenus. Toute ponction qui détourne les redevances des usagers de leurs objectifs initiaux doit cesser.

Les maires des Hautes-Alpes demandent la reconnaissance par le gouvernement de trois principes simples mais fondamentaux :
1) Le respect effectif du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales ;
2) L’acceptation du principe : « qui décide paie, qui paie décide » ;
3) La cessation de tout dénigrement et toute stigmatisation des maires et de l’ensemble des élus locaux.

Neuf sujets de préoccupation

Pour les maires des Hautes-Alpes, neuf sujets doivent être au cœur d’une véritable négociation avec le gouvernement :

  1. L’inscription de la place particulière de la commune et de sa clause générale de compétence dans la Constitution. Il s’agit de donner plus de libertés, de capacités d’initiative et de souplesse aux collectivités, en particulier s’agissant de la répartition des compétences du bloc communal. 
  2. La compensation intégrale et dans la durée de la taxe d’habitation sur les résidences principales qui tienne compte de l’évolution annuelle des bases.
  3. L’ajustement de la contribution du bloc communal à la réduction de la dette publique, au prorata de sa part dans l’endettement (4,5%).
  4. La reconnaissance concrète de la spécificité montagne qui passe par l’application de toutes les dispositions de l’Acte II de la loi Montagne, notamment en termes de fiscalité. L’accessibilité des services publics est un enjeu essentiel pour assurer l’attractivité des territoires de montagne (renégociation du règlement des transports scolaires de la Région PACA, égalité d’accès à des soins de qualité, accès au très haut débit...).
  5. Le retour à une conception véritablement partenariale des contrats établis entre l’État et les collectivités territoriales.
  6. Le réexamen de la baisse des moyens dans des domaines essentiels (logement social, contrats aidés et politique de l’eau).
  7. Le rétablissement du caractère optionnel de tout transfert de compétence, en particulier de la compétence Eau et assainissement.
  8. S’agissant de la compétence GEMAPI, la solidarité entre territoires amont et aval doit être renforcée, notamment au niveau financier.
  9. La question du pastoralisme doit être à nouveau abordée : le gouvernement doit sanctuariser les moyens accordés à l’agriculture pastorale, notamment dans la PAC.

paroles de maires

• Jean-Pierre Gandois, maire de Crots
«J’ai choisi d’organiser un débat, dont j’ai été le médiateur. Il a réuni une quarantaine de participants. Nous avions prévu 2 heures de débat, il a duré près de 3 h. De par ma profession de médecin, je vois bien qu’il y a un gros malaise. Il m’a semblé qu’il fallait essayer d’apporter quelque chose au dispositif, et j’ai trouvé intéressant de l’avoir fait. Les gens ont pu s’exprimer librement. Cela permet de prendre le pouls de la population. Le débat a été enregistré et le compte rendu a été transmis aux instances nationales.»
• Bernard Allard-Latour, maire de Remollon
«Je n’ai pas organisé de débat. Ce n’était pas forcément notre rôle. C’était davantage aux parlementaires, aux grands élus de la nation de le faire. Lors des voeux, j’ai incité mes concitoyens à s’exprimer dans le Grand débat. Nous avons mis en place un cahier de doléances à la mairie. J’y ai mis une lettre ouverte au président de la République, qui portait notamment sur la loi NOTRe. Cette loi a dépouillé les communes de leurs compétences. Il n’en est pas responsable mais ce qui m’agace, c’est le double langage vis-à-vis des communes.»

Le temps est aux actions concrètes

Le président de la République a fait part des conséquences qu’il entend tirer du Grand débat. L’hommage qu’il a rendu aux maires est appréciable. Il doit se traduire par la reconnaissance de la place particulière de la commune et de sa clause de compétence générale dans la Constitution. 
L’AMF05 prend acte de la volonté d’Emmanuel Macron d’engager un nouvel acte de décentralisation. Le temps est désormais aux actions concrètes et à une véritable négociation sur leur contenu. 
Il faut notamment clarifier la question du retour des services publics de l’État dans les territoires, qui est en contradiction avec la poursuite de la fermeture des trésoreries, par exemple. L’AMF05 prend acte de son engagement de ne pas fermer d’écoles et d’hôpitaux. Ce que les maires constatent sur le terrain, c’est la fermeture de classes et de services hospitaliers.
Enfin, le calendrier choisi par le président de la République laisse perplexe. Annoncé pour le 1er trimestre 2020, ce nouvel acte de décentralisation interviendrait en pleine élection municipale. Cela risque d’introduire une incertitude supplémentaire dans un scrutin déjà marqué par l’inconnue de la compensation de la taxe d’habitation.