« L'Etat a pris conscience du rôle des maires »

A l'occasion du congrès des maires à Gap, les grands élus haut-alpins ont unanimement salué l'engagement des maires haut-alpins. Se félicitant de la prise de conscience par les plus hautes autorités de l'Etat de leur rôle, le président de l'AMF 05, Jean-Michel Arnaud, a fait part de son inquiétude au sujet de la suppression de la taxe d'habitation.

Le congrès des maires des Hautes-Alpes a été l'occasion pour le président de l'AMF05, Jean-Michel Arnaud, de revenir sur les points marquants de la mandature qui s'achève. Un « mandat chahuté » notamment par l'adoption de la loi NOTRe, qui a créé une « instabilité institutionnelle » du fait des nouveaux périmètres des intercommunalités et « l'incompréhension » de certains maires quant à la perte d'une partie de leurs prérogatives.

Jean-Michel Arnaud est aussi revenu sur la baisse drastique des dotations imposée aux collectivités, de 2014 à 2017. Ces dotations sont aujourd'hui stabilisées, mais la suppression annoncée de la taxe d'habitation est un sujet d'inquiétude. « Aujourd'hui, nous ne savons pas durablement de quelle manière cette absence de recette de 23 milliards d'euros, importante pour les maires de France, va être palliée. »

« Je comprends que certains aient envie de lâcher »

Revenant sur le mouvement des « gilets jaunes », le président de l'AMF05 s’est félicité de « la prise de conscience du président de la République, qui s'est aperçu que nous n'étions pas la représentation d'un monde disparu et que nous étions, dans l'institution républicaine, celles et ceux qui comprenions le mieux les gens ». Cela se traduit par le projet de loi « Engagement et proximité », qui a pour objectif de repositionner la commune et le maire au cœur de l'action locale. « Dans ses grands principes, ce texte va dans un sens positif », estime Jean-Michel Arnaud.

Le président de l'AMF05 a rendu hommage à l'ensemble des maires et élus municipaux. « S’engager dans l’action municipale est un vrai sacerdoce », souligne Jean-Michel Arnaud. « C’est une action chronophage. Je comprends que certains aient envie de lâcher. »

« Nous redistribuons 12 M€ aux territoires »

« Remettre le maire au centre du village, c'est ce que l'Etat aurait dû faire depuis longtemps », considère le président du Département, Jean-Marie Bernard. Interrogé sur l'augmentation de la taxe foncière votée l'an dernier, M. Bernard la justifie par le fait que « nous n'avions plus la possibilité de dégager des marges de manœuvre. Assurer la solidarité humaine et territoriale passe par des moyens supplémentaires. Une douzaine de millions d'euros supplémentaires, cela correspond à tout ce que nous redistribuons aux territoires. »

Pour Chantal Eyméoud, vice-présidente de la Région et maire d'Embrun, « être maire, ce sont des soucis, des angoisses, des ennuis, mais c'est aussi le plaisir d'être au cœur des décisions pour sa commune. La Région est à vos côtés. La loi NOTRe nous a amenés à recentrer nos dépenses sur nos compétences, ce qui ne va pas sans faire grincer des dents. Mais, avec 30 M€ par an, le FRAT (fonds régional d'aménagement du territoire) est un véritable fonds d'investissement au profit des communes, tandis que les CRET (contrats régionaux d'équilibre territorial) permettent de faire avancer des projets équilibrés au niveau des intercommunalités. »

« Modifier quelques points irritants de la loi NOTRe »

La sénatrice Patricia Morhet-Richaud revient pour sa part sur la compétence eau et assainissement, en annonçant que le Sénat en ferait une « compétence facultative » des intercommunalités, « ce qui nous paraît le mieux ».

Pour la députée Pascale Boyer, « la plupart des citoyens sont reconnaissants du travail que les maires fournissent pour leur commune. Mais il y a un problème sur la condition d'exercice de la fonction d'élu local. » La députée se félicite donc de la teneur du projet de loi « Engagement et proximité », qui va aussi « permettre de modifier quelques points irritants de la loi NOTRe ».

Suppression de la taxe d'habitation : « Aucune collectivité n'y perdra »

La conclusion revient à la préfète des Hautes-Alpes, Cécile Bigot-Dekeyzer, qui souligne les contraintes du mandat de maire, « qui doit se préoccuper du quotidien mais aussi des enjeux plus globaux dans une société plus individualiste, plus exigeante et parfois plus violente. » La préfète insiste sur les moyens financiers accordés par le gouvernement : « La DGF et la dotation à l'investissement ont été maintenues ces deux dernières années. 78,6 M€ ont été versés aux collectivités des Hautes-Alpes au titre de la DGF. Les trois quarts des communes ont vu leur DGF augmenter ou rester stable. » Mme Bigot-Dekeyzer cite également la DETR (dotation d'équipement des territoires ruraux), qui a bénéficié à 163 projets en 2018 et à 173 cette année. « Aucune collectivité qui l'a sollicitée n'a reçu aucune aide de l'Etat », relève la préfète. 

S'agissant de la suppression de la taxe d'habitation, grâce à laquelle « chaque foyer haut-alpin bénéficie en moyenne de 519€ de pouvoir d'achat en plus », elle assure qu'« aucune collectivité n'y perdra. La compensation se fera de façon juste. » Enfin, au sujet de la réorganisation des finances publiques, la préfète rappelle que « la relation avec l'usager a beaucoup évolué tandis que le réseau, lui, n'a pas évolué. Il y a des trésoreries qui ne rendent plus forcément des services à la hauteur des attentes. La volonté est de regrouper certains services pour maintenir le niveau de réponse à l'usager. Mais comme le gouvernement s'y est engagé, aucune trésorerie ne fermera en 2020 sans l'accord du maire. »

TROIS MOTIONS VOTEES A L'UNANIMITE

Lors de leur congrès à Gap, les maires des Hautes-Alpes ont adopté trois motions à l’unanimité. L'une a trait à la compétence eau et assainissement, pour laquelle l'AMF05 demande « la liberté de choix » des communes pour la confier ou non aux intercommunalités, comme le souligne Philippe Biais, maire de Vitrolles.

L'AMF05 s'oppose par ailleurs à la réorganisation du réseau des trésoreries, qui a été suspendue par le gouvernement pour l'année 2020. « Il y a un risque d'éloignement des trésoreries, notamment dans leur rôle de conseil en particulier pour les collectivités rurales », estime Bernard Allard-Latour, maire de Remollon. Jean-Marc Duprat, maire de Laragne-Montéglin, dont la trésorerie est menacée, rappelle aussi que « ce sont sept agents, c'est-à-dire sept familles, ce qui n'est pas rien dans une commune comme la nôtre ».

Enfin, l'AMF05 demande à l'Etat de prendre des mesures contre la prédation du loup afin de « sauver une économie pastorale gravement mise en péril », comme le déplore Jean-Claude Catelan, maire de La Chapelle-en-Valgaudemar.